Le Foreign Office, sa faune et ses grands fauves sont au cœur de ce vingt-troisième roman. Mais en fond de décor, pourrait-on dire. Comme une gourmandise, un théâtre désuet, dont Le Carré, la dent dure et l’appétit féroce, se régale à peindre les masques et les faux-semblants. Un théâtre qui cache la réalité du pouvoir, les jeux en coulisse, le poids des lobbies, le flirt de plus en plus poussé entre affaires publiques et intérêts privés, politique étrangère et business mondialisé […]. Aujourd’hui, les héros de John Le Carré sont ainsi des dissidents, des individus qui se lèvent, seuls, bravent les États et les institutions, mettent leur vie en danger, pour tenter de faire surgir la vérité […]. On s’amuse, ébloui par la finesse du trait, on déguste le texte, mais il se tend peu à peu, quand la guignolade tourne à la catastrophe. Le roman bascule, le lecteur, à l’instar des protagonistes, prend conscience de la tragédie qui vient de se jouer. On sent alors monter la colère de l’auteur, dont le regard sur le monde contemporain est plus affûté que jamais. — Michel Abescat

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