
Témoignage d’Orlov le Suédois, contact de Kim Philby à Biarritz durant la guerre d’Espagne. — « Qu’est-ce que je ferais si je devais soudain recevoir un télégramme me convoquant au pays pour des “consultations” ? Je chierais dans mon froc — ce serait tout aussi dangereux de ne pas y aller que d’y aller. Le NKVD avait le bras long — en de nombreuses occasions, j’avais été ce bras long. »
On connaissait de longue date la fabuleuse histoire de Philby. On savait par ailleurs que Papa Littell est une pointure absolue dès qu’il est question de rapports est-ouest, d’espionnage et d’histoire contemporaine, doublé d’un romancier diabolique capable de manœuvrer en finesse avec des personnages de son invention comme avec des figures historiques. On savait qu’on se régalerait. On s’était procuré l’objet et on l’avait laissé sécher quelques semaines sur une étagère, histoire de se le goinfrer paisiblement, à l’ombre, en un minimum de fois. On a attendu le moment opportun en bavouillant, puis on s’est senti prêt et on l’a lu en deux étapes, un soir et le lendemain matin (dès le café), avec de petits soupirs de ravissement assez ridicules.
Le passé est un prologue. — Shakespeare, La Tempête.